Capitalisation du projet BaCaSi (Batéké Carbon Sink) en République du Congo
1. Contexte et enjeux de l’expérience à capitaliser
1.1. Origine, contexte, enjeux
Avec l’accompagnement partenarial du Secours Catholique Caritas France (SCCF), de Misereor et du CCFD-Terre Solidaire, la Commission Diocésaine Justice et Paix de Pointe Noire (CDJP) a mené, entre 2022 et 2024, un projet visant à renforcer la transparence et la citoyenneté pour le développement en République du Congo. Ce projet répondait à deux défis majeurs : améliorer la transparence et la redevabilité dans la gestion des finances publiques, et favoriser le développement des populations locales dans les zones d’exploitation pétrolière et minière, notamment à travers l’application de la réglementation sur le contenu local de main-d’œuvre, l’accès aux sources d’énergie et la sécurité alimentaire des communautés riveraines. Par ailleurs, la CDJP a élargi son champ d’action en s’attaquant à de nouveaux enjeux, tels que l’impact du changement climatique et la transition écologique, en particulier la transition énergétique, en suivant de près la création par TotalEnergies de puits carbone dans le pays.
En effet, la compensation carbone gagne en popularité auprès des entreprises, qui financent des projets comme la plantation d’arbres dans les pays du Sud pour absorber leurs émissions. TotalEnergies a lancé en novembre 2021 le projet BaCaSi (Batéké Carbon Sink) dans le département des Plateaux. D’après l’entreprise, ce projet a pour objectif le « développement durable d’une zone de 55 000 hectares comprenant la conservation des forêts encore présentes, la plantation d’arbres sur 38 000 hectares en dix ans ainsi que 2 000 hectares d’agroforesterie gérés avec les populations locales ». Selon l’entreprise, ce projet permettrait de « séquestrer sur vingt ans plus de 10 millions de tonnes de CO2 ». Mais, à l’heure de l’urgence climatique, cette pratique est controversée non seulement du fait de son inefficacité, mais aussi car elle détourne des efforts nécessaires pour réduire drastiquement les émissions de gaz à effet de serre.
La CDJP a été alertée par les populations locales sur les impacts de ce projet qui prive les populations locales de l’accès à des ressources, et de leurs terres vitales pour leur subsistance.
Un dialogue a été engagé dès 2022 avec les responsables du projet chez TotalEnergies et des missions de terrain ont été réalisées par la CDJP. En mars 2023, le SCCF et le CCFD-Terre solidaire ont pris part à une mission pour interroger les personnes affectées par le projet. Les témoignages récoltés et les échanges avec les porteurs de projet ont alors mis en lumière le non-respect de plusieurs étapes du séquençage imposées par les principes directeurs des Nations unies : le Clip (consentement libre et informé préalable).
Cette démarche a conduit à la publication, en octobre 2023, du rapport « La compensation carbone au prix des droits humains ? ».
L’objectif de ce rapport était quadruple :
- Établir des recommandations à destination de l’Etat congolais et TotalEnergies pour remédier la situation localement et demander des mesures de compensations pour les personnes affectées par le projet.
- Établir des recommandations pour mieux encadrer le cadre réglementaire de ces projets (article 6 de l’accord de Paris discuté lors de la COP 28 et COP 29) pour éviter des manquements similaires dans la conception de projets de compensation carbone.
- Sensibiliser l’opinion publique française aux dangers de la compensation carbone et à ses impacts sur les droits des communautés locales dans les pays du Sud, via les médias.
- Mobiliser des réseaux d’alliés pour renforcer et élargir la portée des demandes de plaidoyer lors d’échéances politiques majeures.
1.2. Attentes de la capitalisation
Un an après la publication de ce rapport, et deux ans après la visite de terrain de la CDJP, du SCCF, et du CCFD-Terre Solidaire pour constater les impacts environnementaux et sociaux du projet de compensation carbone, la CDJP et ses partenaires ont entrepris une réflexion interne sur les leçons à tirer de cette expérience. Parallèlement, une réflexion quant à la suite de ce plaidoyer est engagée, en particulier pour suivre les mesures de remédiation mises en œuvre par TotalEnergies, et l’accès à des documents essentiels (Plan de Restauration des Moyens de Subsistance, CLIP) pour garantir davantage de transparence et un suivi efficace.
L’enjeu aujourd’hui est de capitaliser sur ce plaidoyer singulier, en vue d’en tirer des enseignements et que la CDJP puisse les mettre en pratique dans des projets similaires.
La CDJP est reconnue pour son engagement sur le terrain et dans les sphères économique et politique, notamment à travers son plaidoyer sur des enjeux tels que la démocratie, l’impact des industries extractives, la mobilisation des communautés pour la défense de leurs droits, la gestion des finances publiques et les questions environnementales. Elle souhaite valoriser ses réussites afin d’identifier de nouvelles sources de financement.
La nécessité d’outils de capitalisation a été identifiée par les équipes de la CDJP et mise en évidence dans l’évaluation externe réalisée par Misereor en 2024 sur le projet «Renforcement de la transparence et de la citoyenneté pour le développement en République du Congo». Parmi les recommandations figurent la création de documents de pilotage et de suivi-évaluation, en s’appuyant sur des notes de capitalisation, ou encore la production d’un document clarifiant la stratégie de plaidoyer et la co-construction des solutions avec les différentes parties prenantes.
En capitalisant sur cette expérience, la CDJP souhaite :
- analyser en profondeur le rôle joué dans ce plaidoyer en identifiant les facteurs ayant permis le changement, aussi bien en interne qu’en externe, tout en examinant les blocages, leur nature et les mesures de correction mises en place;
- évaluer si un véritable plaidoyer structuré a émergé, avec une stratégie, une vision politique et des recommandations dépassant le cas BaCaSi, ou si l’action est restée au niveau d’un plaidoyer de projet ;
- analyser la collaboration avec les organisations internationales, le positionnement adopté dans ce processus collaboratif ;
- valoriser son expertise, précisément son savoir-faire, savoir-être en matière de plaidoyer, pour se positionner en leader ou référence dans ce domaine d’intervention et, notamment, la promouvoir auprès de partenaires, bailleurs de fonds, etc. ;
- être formé à la méthodologie de la capitalisation, afin de la reproduire sur d’autres expériences, projets et expertises.
Un des objectifs établis par la DAPI (Direction Action et Plaidoyer Internationaux) du SCCF est d’accompagner ses partenaires vers un impact plus profond sur leurs pratiques, leur apprentissage et leur expertise. Dans le cadre du projet « Utilisation et gestion des ressources naturelles pour la réduction de la pauvreté et le développement en République du Congo », mis en œuvre en 2025 et cofinancé par le SCCF, un accompagnement spécifique est prévu pour permettre à la CDJP de capitaliser sur le rapport BaCaSi, depuis sa production et publication jusqu’au suivi de ses retombées.
La CDJP, dans une démarche apprenante, s’attache à tirer les leçons de ses expériences de plaidoyer. Le cas du projet BaCaSi est particulièrement singulier, du fait d’un rapport de force avec des acteurs privés, et non pas d’un dialogue avec les décideurs publics, comme à l’accoutumée. Il semble donc intéressant de tirer des enseignements du rapport de force établi avec l’entreprise, de la collaboration entre associations aux pratiques différentes, et de l’articulation de différentes échelles de plaidoyer :
- Échelle locale (CDJP – acteurs d’église, communautés locales, autres acteurs locaux): déterminer les éléments essentiels pour établir une relation de confiance, comment faire connaître les problèmes auprès des différents acteurs et favoriser une approche participative et inclusive.
- Échelle partenariale (CDJP-SCCF) : analyser les pratiques réussies et celles à améliorer afin d’ajuster les méthodes et de proposer un accompagnement adapté.
- Échelle inter-associative (SCCF, CCFD-Terre Solidaire, Misereor) : identifier les conditions de réussite, les points d’attention, et les impacts sur la relation avec la CDJP. Identifier les limites techniques, matérielles et les défis (stratégiques, divergences des agendas, intérêts, etc.), de posture de ces organisations, ainsi que l’enjeu du turn over au sein des organisations membres de la démarche.
- Échelle du collectif (CDJP, SCCF, CCFD-Terre Solidaire, Misereor): interroger la coordination des efforts et comment mutualiser les apprentissages pour maximiser l’impact.
Enfin, pour lutter contre l’évaporation des expériences due à la rotation rapide du personnel, documenter cet apprentissage de manière claire et accessible, permettra de contribuer à ancrer durablement les connaissances et à favoriser une amélioration continue des pratiques et collaborations.
2. Le projet de la capitalisation
2.1. Objectifs
Objectif général:
Identifier les enseignements issus de la dynamique collective autour du plaidoyer sur le projet BaCaSi, afin de les transformer en connaissances partagées, de mettre en valeur l’expertise acquise, et faciliter la recherche de nouveaux partenaires.
Objectifs spécifiques:
- Relever et analyser les leviers et limites de la collaboration entre les différentes parties prenantes du projet BaCaSi.
- Identifier les compétences spécifiques développées pendant le plaidoyer, au sein du collectif, notamment en matière de mobilisation, de négociation, de communication, et de gestion des relations.
- Formaliser les enseignements tirés de l’expérience du plaidoyer en ressources capitalisées (formats à définir) et rendre ces connaissances accessibles en interne et externe.
- Saisir l’occasion de capitalisation pour faire monter en compétences les membres de la CDJP à la méthode de la capitalisation, en adoptant une démarche de formation-action.
2.2. Contributeurs au processus de capitalisation
Le projet a été mis en œuvre en consortium avec des partenaires internationaux et nationaux. La capitalisation est une démarche collective, repérable par ceux et celles qui ont participé à l’action. Aussi, la liste des participant.e.s ci-dessous est proposée, sous réserve de confirmation:
- CDJP: direction, responsable des projets, chargée du programme d’afforestation, responsable du Département des droits humains, de la capitalisation et de l’analyse stratégique (4 personnes).
- SCCF: chargée de plaidoyer au Pôle Plaidoyer International, chargée de partenariat et bénévole au Pôle Afrique & Océan Indien (3 personnes).
- CCFD-Terre solidaire: chargé.e.s de mission (2 personnes).
- Misereor: chargé.e de programme (1 personne).
2.3. Partie prenantes ou destinataires finaux
Les principaux destinataires de cette capitalisation sont d’abord les contributeurs susmentionnés, ainsi que les équipes actuelles et futures de la CDJP, afin qu’elles puissent en tirer des enseignements sur les pratiques et l’organisation. Plus largement, cette capitalisation s’adresse également aux partenaires financiers, aux autres CDJP du Congo et à tout autre acteur intéressé par ces thématiques.
2.4. Production attendue à l’issue de la capitalisation
La CDJP souhaite élaborer un document détaillant cette expérience, à la fois pour un usage interne et externe. En interne, un livrable servira de référence pour ses équipes, leur permettant de capitaliser sur les enseignements tirés et d’améliorer leurs pratiques. En externe, d’autres livrables seront destinés aux partenaires financiers, aux autres CDJP du Congo, ainsi qu’à d’autres acteurs intéressés, afin de partager les apprentissages, valoriser les actions menées et favoriser les échanges de bonnes pratiques.
Ces livrables pourront prendre des formes variées, selon les propositions du/de la consultant.e : documents, synthèses, infographies, vidéos, interviews, podcasts, ou encore fiches de bonnes pratiques.
2.5. Moyens de partage, de valorisation et diffusion des produits/résultats
Les supports et canaux de diffusion, non exhaustifs, pourront être les suivants :
- site internet et réseaux sociaux de la CDJP,
- rapports internes et publications périodiques,
- newsletter aux partenaires,
- temps de restitution internes et externes,
- présentation lors de réunions avec les partenaires financiers existants et potentiels.
3 Cadre méthodologique
3.1. Pilotage et animation
Pilotage du processus de capitalisation : chargée de partenariat au PAOI/SCCF, Consultant.e, représentants de la CDJP.
Réalisation des entretiens / Animation d’ateliers participatifs: Consultant.e, avec le support de 4 personnes de la CDJP.
3.2. Méthodologie
La méthodologie proposée devra être interactive et participative, en privilégiant une dimension de formation-action en mesure de favoriser les objectifs de montée en compétences des équipes de la CDJP susmentionnés
- Revue documentaire
Analyse approfondie des documents existants en lien avec l’expérience à capitaliser. Il s’agira d’identifier les éléments clés, les défis rencontrés et les enseignements préliminaires afin d’alimenter les étapes suivantes du processus.
- Réunions de cadrage
Organisation de deux à trois réunions en ligne pour définir l’approche de la capitalisation, clarifier les objectifs, les attentes, le cadre méthodologie et choisir la question/axe principal de la capitalisation, avec la participation des personnes ayant pris part à l’expérience.
- Entretiens et focus group
Conduite d’entretiens individuels et de groupes de discussion avec les acteurs clés impliqués dans l’expérience. Ces échanges permettront d’approfondir la compréhension des pratiques mises en œuvre, des difficultés rencontrées et des solutions adoptées.
- Ateliers participatifs
Organisation au moins d’un atelier en présentiel avec les parties-prenantes afin de revenir sur l’expérience, la raconter, s’interroger sur les points de basculement (« comment on a fait »), identifier les éléments clés; explorer les approches de diffusion et de préservation des savoirs en fonction des enjeux internes et externes; planifier la production des livrables. Le choix du lieu sera déterminé en fonction de la méthodologie adoptée par le·la consultant·e et des contraintes logistiques.
- Production des livrables et restitution par visioconférence des livrables produits aux parties-prenantes.
Finalisation des livrables en intégrant les retours et recommandations des acteurs impliqués. A minima, organisation d’une visioconférence de restitution pour présenter les livrables définitifs aux parties prenantes et échanger sur les modalités d’utilisation et sur la stratégie de diffusion/valorisation.
- Estimation de la charge
Nous estimons la charge de travail à environ 25 jours/homme
3.3. Calendrier
- Lancement du projet (sélection du consultant et finalisation du plan de travail): fin avril 2025
- Phase préparatoire (revue documentaire et réunions de cadrage en ligne): 1 ère quinzaine de mai :
- Ateliers participatifs (séance en présentiel, entretiens semi-directifs, focus group):
- 19 – 23 mai 2025: si le lieu choisi est en France,
- 15 – 30 juin 2025: si le lieu choisi est en République du Congo.
- Production des livrables provisoires: 1er juin – 31 août 2025
- Validation et ajustements: 1er – 30 septembre 2025
- Production des livrables définitifs et restitution: 1er – 31 octobre 2025
- Fin du projet: 15 novembre 2025
3.4. Moyens humains
Le.a consultant.e en capitalisation sélectionné sera appuyé par:
- 1 chargée de partenariats PAOI/SCCF
- 1 bénévole en appui aux partenariats en Afrique Centrale PAOI/SCCF
- 10 participants au processus de capitalisation (à confirmer)
3.5. Profil attendu du/de la.e consultant.e
- Formation supérieure en sciences sociales, développement, gestion de projet, gouvernance ou toute discipline pertinente.
- Minimum 5 à 10 ans d’expérience dans des missions similaires (capitalisation de projets, plaidoyer, gouvernance, développement).
- Compréhension des enjeux liés aux droits humains, à la transparence financière, à l’environnement et aux industries extractives.
- Familiarité avec les défis du dialogue entre acteurs locaux, institutions et entreprises multinationales.
- Capacité à transformer des expériences en documents de référence, exploitables par différentes parties prenantes.
3.6. Propositions techniques et financières
- Synthèse de deux pages au maximum soulignant les points forts de la proposition.
- Compréhension des lignes directrices de la capitalisation.
- Présentation de l’approche méthodologique pour la capitalisation du projet BaCaSi, un détail des outils et techniques envisagés (ateliers participatifs, entretiens, analyse documentaire, etc.), ainsi qu’une proposition des formats de restitution des résultats (rapport, supports visuels, etc.).
- CV du ou de la consultant.e avec son expérience personnelle dans les domaines concernés.
- Plan de travail avec un calendrier.
- Travaux, productions, exemples de réalisations antérieures de même types (ainsi que des recommandations sont les bienvenus) et 3 références si possible.
- Proposition de budget, toutes taxes comprises, avec répartition détaillée (honoraires et autres frais), et montant HT en euros et taux de la TVA.
3.7. Modalités de candidatures
Seuls des consultants dûment enregistrés ou des cabinets de conseil peuvent répondre.
Les offres sont à envoyer par mail à l’adresse suivante dept.personnelappuiexterne@secours-catholique.org avec pour objet : «CONSULTANCE CAPITALISATION BACASI» au plus tard le 12/04/2025.
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