Communiqué de presse|Garder le cap des 0,7 % !
Paris, le 13 avril 2023 – L’Organisation de Coopération et de Développement Économique (OCDE) a annoncé que, au cours de l’année 2022, la France a alloué 15,9 milliards de dollars d’aide publique au développement (APD), soit 0,56 % de son revenu national brut, devenant ainsi le 4ème plus gros pays donateur d’APD en volume (5ème en comptant l’Union européenne et ses Etats membres), passant devant le Royaume-Uni lequel a drastiquement réduit son APD depuis 2019. Cette augmentation correspond à une hausse de 12,5 % depuis 2021, ainsi qu’à l’atteinte d’un premier palier de la trajectoire de financement, tel que fixé par la loi sur le développement solidaire du 4 août 2021. Une première étape atteinte en vue du 0,7 % que salue Coordination SUD et ses 184 organisations membres.
Cependant, ce premier succès reste à confirmer, notamment lors du futur Conseil présidentiel pour le développement, et du projet de loi de finance pour 2024. « Coordination SUD et ses 184 organisations membres resteront très attentives à ce que l’objectif de 0,7 % à horizon 2025 affiché par la loi du 4 août 2021 soit définitivement consacré à cette occasion. Une loi dont nous rappelons qu’elle a été présentée par le gouvernement et adoptée à l’unanimité des groupes parlementaires » déclare Olivier Bruyeron, Président de Coordination SUD. Autre point d’attention, l’augmentation de l’APD de la France (+ 12,5 %) est également à mettre en miroir avec la forte croissance des coûts d’accueil des personnes réfugiées qui représentent dorénavant 9,4 % de son APD totale !
À mi-parcours de l’Agenda 2030 et à deux mois de l’organisation d’un Comité interministériel de la coopération internationale et du développement et du Sommet Pour un nouveau pacte financier mondial, les 22 et 23 juin prochains, initié par la France, le gouvernement se doit d’être à la hauteur des enjeux et des espoirs qu’il a créés. « Sans l’affirmation de ces 0,7 %, il est clair que le gouvernement ne disposera pas des moyens nécessaires pour mettre en œuvre la programmation de la loi et se privera d’envoyer un signal fort, et ainsi d’impulser une nouvelle dynamique internationale » affirme Gautier Centlivre, chef de file de la Commission APD et financement du développement de Coordination SUD et Coordinateur du plaidoyer d’Action Santé Mondiale.
2022 : une augmentation relative de l’APD française
L’augmentation de l’APD, de 2021 à 2022, qui a permis à la France d’atteindre la cible de 0,56 % du RNB, a été en partie portée par la forte hausse des coûts d’accueil des personnes réfugiées. Si la hausse de ces coûts s’explique par la guerre en Ukraine, ces frais concernent l’accueil des personnes réfugiées en France et ne bénéficient donc pas directement aux pays les plus fragiles, et ne contribuent pas davantage à la lutte contre les inégalités et au bien-être des populations de ces pays. La comptabilisation de ces coûts dans l’APD est fortement critiquable. Pour Coordination SUD, l’accueil des personnes réfugiées étant un devoir des États au nom du droit international, les dépenses liées, parce que ne concernant que le seul État d’accueil, relèvent donc des politiques sociales, et non de l’aide publique au développement.
De plus, la France a mobilisé d’importantes ressources pour faire face à la crise humanitaire en Ukraine. Cette réponse légitime à de nouveaux besoins ne devrait cependant pas prioriser les crises, ce qui rendrait l’aide française inégale et hiérarchiserait les situations de vulnérabilité avec un impact notable pour les autres pays et populations. Une préoccupation d’autant plus forte que la France a décidé en 2022 de suspendre ses financements à destination des projets de développement au Mali. C’est pourquoi les ONG demandent à la France de garantir des budgets additionnels en réponse aux besoins d’aide humanitaire de la population ukrainienne.
Une première étape atteinte vers la cible des 0,7 %
L’augmentation du budget de l’APD ces dernières années a permis à la France d’allouer 0,56 % de son RNB à l’aide publique au développement en 2022, une première étape de la trajectoire de financement définie par la loi du 4 août 2021. Cette première étape vise à atteindre la cible finale de 0,7 % en 2027, objectif nécessaire pour mettre en œuvre les engagements internationaux de la France ainsi que les ambitions fixées par la loi de 2021 en faveur de la lutte contre la pauvreté, les inégalités et le réchauffement climatique. Si la France se hisse ainsi à la 4ème place des principaux donateurs du CAD en montant d’APD, elle recule de la 7ème à la 10ème place du classement des pays en proportion du RNB.
La programmation envisagée par le gouvernement pour les prochaines années et communiquée à Coordination SUD laisse supposer un abandon de la cible de 0,7 % à horizon 2025. Une telle décision serait incohérente avec les engagements de la loi du 4 août 2021 et le contexte d’aggravation de la pauvreté et de hausse des besoins humanitaires, notamment accentués par la guerre en Ukraine. Alors qu’il y a moins de 2 ans le Parlement votait à l’unanimité des groupes parlementaires l’atteinte de ces 0,7 %, le gouvernement risquerait, si cela venait à être confirmé, d’opérer un revirement injustifié qui remettrait en cause l’ensemble des objectifs fixés par la loi du 4 août 2021 pour la lutte contre la pauvreté, pour le climat, les jeunesses, l’égalité de genre, les biens publics mondiaux, et les droits humains.
L’APD, un instrument de financement nécessaire pour répondre aux besoins des populations vulnérables
Les chiffres 2022 de l’APD au niveau international montrent une diminution de 0,7 % des financements à destination des pays les moins avancés, dont une baisse de 7,8 % des financements à destination des pays d’Afrique subsaharienne. Ce recul est révélateur d’une architecture de financement qui ne répond que très insuffisamment aux objectifs prioritaires de l’aide au développement, objectifs que l’on retrouve dans la loi française, qui mentionne les pays les moins avancés, dont la plupart se situe en Afrique, et les services sociaux de base.
Par ailleurs, la France continue de porter une part importante de son aide à travers des prêts, faisant d’elle l’un des pays attribuant la plus grande part de son APD bilatérale sous forme de prêts souverains, derrière le Japon et la Corée du Sud. Or cette place occupée par les prêts dans la mise en œuvre de l’APD française conduit à prioriser les pays à revenu intermédiaire et les projets d’infrastructures de grande échelle. Ceci explique le décalage constaté avec les objectifs affichés par la loi. C’est pourquoi « il est essentiel, aujourd’hui, que la France fasse évoluer son APD, dans le but de la concentrer davantage sur les pays les moins avancés et les services sociaux de base. Pour cela, il est nécessaire que le gouvernement s’engage à renforcer très significativement les moyens disponibles de don, ce qui lui permettrait d’être pleinement en phase avec les orientations fixées dans le cadre de la loi » partage Kevin Goldberg, référent auprès du Conseil d’administration de Coordination SUD pour la Commission APD et financement du développement et Directeur général de Solidarités International.
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